Si l’introduction du papier timbré en Espagne est très précoce, dès 1637, les premiers exemples d’utilisation dans le comté de Hainaut datent des années 1680 seulement1. L’ordonnance ultérieure de Sa Majesté pour la levée du droit sur le petit seel ou papier timbré, pour la province de Haynau du 14 octobre 1703 en précise l’usage, adapté aux particularismes de la province. Cette ordonnance prolonge et explicite celle du 16 janvier de la même année qui avait généralisé et harmonisé l’usage du papier timbré dans toutes les provinces des Pays-Bas espagnols. Jusque là, l’application et la perception du droit de timbre ou de petit scel était très variable selon les provinces et les villes. En Hainaut, sa gestion semble avoir été partiellement déléguée aux Etats comme le laisse entendre l’article V de l’ordonnance d’octobre 1703 qui prévoit des compensations financières pour les Etats de Hainaut qui avaient pris de l’argent à rente sur ces doits.
A partir de ces ordonnances, le droit timbre devient systématique et sa forme est normalisée : aux armes du Roi il porte en outre l’année et le tarif du droit devant être acquitté et doit, pour être valable, porter la signature du receveur ou du contrôleur du droit de timbre2. Pour lutter contre la fraude et la pratique consistant à antidater les actes, le timbre est changé chaque année, sa matrice détruite. Il est de plus formellement interdit d’utiliser un papier timbré de l’année précédente sous peine de nullité de l’acte ainsi rédigé et d’une amende de 200 florins pour l’officier qui l’aura rédigé. S’il restait du papier de l’année précédente, il devait être remis et rapporté aux collecteurs et contrôleurs du droit du timbre au plus tard à la fin du mois de janvier de la nouvelle année sous peine d’une amende de 50 florins par feuille encore en possession de l’officier public, notaire, échevin ou homme de fief.
Alors que le Hainaut français est exempté de droit de timbre, celui-ci s’applique dans le comté de Hainaut sur tous les actes pouvant être portés en justice afin d’en garantir l’authenticité, actes scabinaux comme notariés mais il ne concerne pas les registres paroissiaux qui resteront toujours tenus sur papier libre. Les actes judiciaires de l’official de Cambrai ne sont soumis à l’usage du papier timbré qu’à partir de 1733, par décret de l’archiduchesse Marie-Elisabeth3.
Evolutions et variations du timbre
Les variations de timbre sont un reflet de l’histoire mouvementée du Hainaut au XVIIIe siècle. D’abord établi aux armes du comté, le timbre porte à partir de la réforme du droit de timbre de Philippe V les armes personnelles du roi dans un premier temps (avec notamment le blason d’Anjou et le collier de l’ordre du Saint-esprit adjoints aux armes d’Espagne), puis celles du royaume d’Espagne.
La période d’occupation française pendant la guerre de succession d’Autriche entre 1746 et 1748 est également reflétée sur les timbres en vigueur, désormais fleurdelysés, ce qui amène à cette situation paradoxale où le Hainaut français demeure exempté quand le Hainaut occupé paie à la couronne de France le droit de timbre. Après le règne de l’impératrice Marie-Thérèse et le gouvernorat de Charles-Alexandre de Lorraine, son fils l’empereur Joseph II fait apposer les armes et l’aigle bicéphale des Habsbourg d’Autriche sur le timbre.
Les éphémères Etats-Belgiques-Unis créés par le traité d’Union du 11 janvier 1790 à la suite de la révolution brabançonne contre les réformes de Joseph II, donnent lieu à l’émission de nouveaux timbres, aux armes de chaque province.
De même, l’Assemblée générale du peuple souverain du Hainaut à Mons fait émettre en 1793 un papier timbré à la devise Liberté, Egalité dans le sillage de la Révolution française.
Les deux restaurations impériales en 1791 et 1793 feront disparaître ces timbres éphémères avec un retour au timbre impérial à l’aigle bicéphale.
Pour le généalogiste
Les timbres portent toujours l’année d’émission. Le droit de timbre étant acquitté dans la plupart des cas immédiatement lors de l’établissement de l’acte ou de la copie de l’acte, cela permet au premier coup d’oeil de dater l’acte consulté, ou le moment où il a été nécessaire de faire établir une copie de cet acte, souvent à l’occasion d’une procédure en justice.
Si les intéressés étaient dans l’incapacité de payer le droit de timbre sur le moment, la mention « à charge de timbre nécessaire » était apposée sur l’acte. On trouve souvent une feuille de papier timbré jointe à l’acte par après portant l’indication que ce timbre est à l’effet de l’acte auquel il est joint. C’est une indication sur la capacité financière des parties.
De même, comme le tarif des droits pour les actes scabinaux comme pour ceux passés devant la cour féodale, les francs allotiers, les hommes de fiefs ou les notaires est, pour chaque type d’acte, proportionnel à la valeur des biens concernés par l’acte, le timbre en tête du document donne ainsi avant même de le lire une indication sur la valeur des biens mentionnés dans l’acte Ainsi le droit de timbre sur un contrat de mariage peut varier de deux patars à quinze florins et plus selon la fortune des futurs époux4.
Exemples de papiers timbrés
La galerie ci-dessous présente quelques exemples de papiers timbrés en usage dans le comté de Hainaut.
Passez avec la souris sur l’image pour faire apparaître sa légende.
1 L’usage du papier timbré avant 1703 semble être très inégal selon les provinces et les villes. On trouve des actes notariés à Anvers sur papier timbré dès 1646 quand ils sont absents dans les autres villes du duché de Brabant. Les registres de la Chambre des Comptes font état de comptes pour les produits des droits de timbre et de petit scel du Conseil privé et du Grand Conseil rendus par Balthazar de Robiano, seigneur de Steenvoorde, secrétaire ordinaire du Roi au Conseil privé dès juin 1667. Archives générales du Royaume, BE-A0510_000014_803255_FRE.
2 Il semblerait que le duché de Brabant ait conservé très longtemps des timbres dont la forme lui est propre, aux armes du duché mais portant également l’année et le droit dû comme les timbres aux armes royales. Le comté de Flandre comme le comté de Hainaut n’utilise plus que les papiers timbrés aux armes royales à partir de 1703.
3 Archives de l’Etat à Mons – AEM.01.151 – 1118.
4 L’ordonnance de 1703 prévoit un tarif de 3 sols ou 3 patars pour tous les actes dont le montant des biens concernés est inférieur à 200 florins, porté à 6 sols pour des biens d’une valeur de 200 à 500 florins, de 12 sols pour des biens d’une valeur de 500 à 1000 florins puis de 12 sols en 12 sols par tranche supplémentaire de 1000 florins, sans excéder 15 florins.
Je découvre ce blog et un regard très intéressant sur la généalogie belge. Je découvre encore des choses, bien que je pensais avoir déjà de bonnes bases sur la généalogie en Hainaut que je pratique depuis 30 ans. Je lirai avec attention les prochains billets de ce blog.
On peut savoir qui se cache derrière ce site ?
Damien Desqueper – Association Généalogique du Hainaut Belge
Merci Damien. Une archiviste française qui a épousé un Belge et part à la découverte des racines de ses enfants 🙂
Merci Damien d’avoir posé la question 🙂
Un grand BRAVO pour la participation au challengeAZ et pour ce blog vraiment très réussi.
Une autre archiviste française !
Merci Sandrine